
Imaginez un monde sans selfies. Pas de duck face, pas de photos prises à bout de bras avec des amis, pas d’images maladroitement recadrées où l’on coupe son front. Ce monde a bel et bien existé, jusqu’à ce qu’un homme décide d’inverser la caméra sur lui-même. Il ne le savait pas encore, mais il allait marquer l’histoire… et peut-être même irriter les amateurs de vieilles peintures.
Quand tout a commencé : le tout premier selfie
Nous sommes bien avant l’ère des smartphones, du Wi-Fi et des filtres embellisseurs. À cette époque, les photos étaient précieuses, car elles nécessitaient du matériel encombrant, une pose interminable et une patience d’ange pour ne pas bouger. Mais un jour, quelque part sur la planète, un homme a décidé qu’il n’avait pas besoin d’un photographe pour exister sur une image.
Son nom ? Robert Cornelius, un Américain passionné de photographie et de chimie. En 1839, alors que le daguerréotype (le premier procédé photographique commercialisé) faisait ses débuts, Cornelius tenta quelque chose d’inédit : prendre un portrait de lui-même.
Il installa son appareil photo, retira l’objectif, courut se placer devant, resta figé plusieurs minutes – le temps d’une exposition longue – puis remit le cache en place. Le premier selfie était né.
Une prouesse qui, à l’époque, devait sembler aussi étrange que de se parler à soi-même dans la rue.
Un génie ou un simple narcissique avant l’heure ?
Aujourd’hui, le selfie est synonyme d’égoportrait, de mise en scène personnelle et de course aux « likes ». Mais dans le cas de Robert Cornelius, il n’était ni question d’égocentrisme ni de recherche d’approbation numérique (les hashtags et TikTok étant encore à des siècles d’existence). Son geste était purement expérimental : il voulait voir s’il pouvait se photographier lui-même.
Loin d’une obsession pour les « vues », son cliché a surtout marqué l’histoire parce qu’il a prouvé que la photographie pouvait être une forme d’expression personnelle. Fini l’attente d’un artiste-peintre pour immortaliser un visage : en quelques minutes, on pouvait fixer son image pour l’éternité.
En regardant son selfie aujourd’hui, on remarque un air sérieux, presque inquiet. Peut-être pensait-il : « Bon, si ça rate, je recommence… Ah non, zut, c’est un daguerréotype, je n’ai qu’une chance. »
Du premier selfie à la révolution numérique
Après Cornelius, d’autres ont tenté l’expérience, mais le selfie est resté un plaisir rare et réservé aux passionnés d’expérimentations photographiques. Pendant longtemps, on se contentait de portraits classiques pris par des photographes professionnels ou des amis serviables.
Il faudra attendre plus d’un siècle et demi avant que le numérique ne vienne révolutionner la donne. Avec l’arrivée des premiers appareils photos compacts, puis des téléphones avec caméras intégrées, le selfie est entré dans une nouvelle dimension.
Puis vint la révolution ultime : la caméra frontale. À partir de ce moment-là, plus besoin de tendre le bras et de rater son cadrage, plus d’incertitude sur l’image finale… sauf si, bien sûr, on oubliait que le flash était activé et que l’on finissait avec un teint de zombie fluorescent.
L’explosion du selfie : entre art et grand n’importe quoi
Avec l’explosion des réseaux sociaux, le selfie a pris une toute nouvelle ampleur. Il est devenu :
- Une forme d’art (certains selfies sont dignes de musées… d’autres, disons, sont plutôt à ranger dans la catégorie « échec cuisant »).
- Un outil de communication (plus rapide qu’un texte : une photo, une légende, et hop, message compris).
- Un moyen de survie sur les sites de rencontres (parce que personne ne veut d’une photo floue de 2003 avec un flash trop violent).
Bien sûr, cela n’a pas toujours été sans conséquences. Qui n’a jamais vu des selfies maladroits : des grimaces involontaires, des photobombs impromptus, ou pire, des reflets malencontreux dans un miroir révélant un décor embarrassant ?
Et que dire des selfies périlleux ? Entre ceux qui posent au bord d’une falaise et ceux qui s’approchent un peu trop près des lions en safari, certains oublient que la photo parfaite ne vaut pas une vie.
Le selfie, une révolution culturelle
Si Cornelius voyait ce qu’il avait déclenché, il serait sans doute partagé entre fierté et incrédulité. Qui aurait cru qu’un simple autoportrait deviendrait un phénomène culturel majeur ?
Aujourd’hui, il existe des perches à selfie, des miroirs interactifs, des filtres qui modifient votre visage, et même des intelligences artificielles capables de sublimer vos traits en un clic. Le selfie est partout, omniprésent, et parfois même un peu envahissant.
Mais au fond, c’est aussi une façon pour nous de nous approprier notre image, de fixer des instants, de raconter une histoire en une fraction de seconde. Et même si l’on peut critiquer son omniprésence, il reste une preuve que l’on aime immortaliser nos moments de vie, à notre façon.
Alors, la prochaine fois que vous prenez un selfie, ayez une pensée pour Robert Cornelius. Sans lui, vous auriez peut-être encore besoin d’un peintre pour capturer votre plus beau sourire !
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