Depuis deux ans, les anomalies de température de surface dans l’océan Atlantique, qui atteignent des niveaux jamais observés, troublent la communauté scientifique. « C’est vraiment affolant, on entre dans une zone inconnue », affirme la paléoclimatologue Anne de Vernal, professeure au département des sciences de la Terre et de l’atmosphère de l’UQAM.
Un réchauffement global, mais plus lent dans les océans
Si les températures moyennes au sol augmentent depuis les débuts de l’ère préindustrielle, c’est le cas également dans les océans, mais à un rythme plus lent, signale Anne de Vernal. Il faut rappeler ici que les océans occupent 70 % de la surface de la Terre. Sans eux, le réchauffement de la planète serait beaucoup plus important puisque les océans ont absorbé jusqu’à présent 90 % de l’excès de chaleur provoqué par les changements climatiques. Ils absorbent aussi près de 30 % du CO2 émis chaque année.
« L’océan est ainsi un réservoir de chaleur qui accumule de l’énergie, explique Mme de Vernal. Or, les délais d’homogénéisation du réservoir sont très longs, de l’ordre du millier d’années. » Concrètement, cela signifie que le réchauffement actuel des océans est irréversible. Dans l’éventualité où l’humanité cesserait dès aujourd’hui d’émettre des gaz à effet de serre (GES), il faut compter en milliers d’années le temps qu’il faudra aux océans pour se refroidir. À l’inverse, ne pas réduire nos émissions contribue à accélérer le réchauffement des océans, qu’on observe maintenant jusqu’à 2000 mètres de profondeur.
Les conséquences écologiques et climatiques
Le réchauffement des océans a des conséquences écologiques majeures. Les écosystèmes marins sont profondément perturbés par l’augmentation des températures. De nombreuses espèces marines, incapables de s’adapter à ces changements rapides, sont menacées d’extinction. Les récifs coralliens, en particulier, souffrent de blanchissement, un phénomène causé par le stress thermique qui tue les coraux.
En outre, le réchauffement des océans contribue à l’augmentation du niveau de la mer. L’eau chaude occupe plus de volume que l’eau froide, un phénomène appelé dilatation thermique. Cette augmentation, combinée à la fonte des glaciers et des calottes glaciaires, menace les régions côtières et les petites îles, augmentant le risque d’inondations et de submersion.
Les courants marins, qui jouent un rôle crucial dans la régulation du climat global, sont également affectés. Par exemple, le Gulf Stream, un courant chaud de l’Atlantique Nord, pourrait ralentir en raison du réchauffement des eaux. Un tel ralentissement aurait des conséquences climatiques importantes, notamment en Europe, où le Gulf Stream contribue à maintenir des températures relativement douces.
Les implications pour l’avenir
La situation actuelle appelle à une prise de conscience et à des actions urgentes. Réduire les émissions de GES est une priorité pour limiter les impacts futurs. Cependant, il est également crucial de préparer les sociétés à s’adapter aux changements inévitables. Cela inclut la protection et la restauration des écosystèmes marins, la planification de l’urbanisation côtière pour faire face à la montée des eaux, et l’investissement dans la recherche pour mieux comprendre et prévoir les effets du réchauffement des océans.
Les gouvernements, les scientifiques, les entreprises et les citoyens doivent collaborer pour développer des solutions innovantes et durables. La lutte contre le réchauffement des océans nécessite une approche globale et intégrée, tenant compte des interconnexions entre les systèmes climatiques, écologiques et socio-économiques.
En conclusion, le réchauffement des océans est un défi majeur de notre époque. Il est impératif d’agir maintenant pour réduire les émissions de GES et minimiser les impacts futurs. Les océans, en tant que régulateurs du climat mondial, jouent un rôle crucial dans notre survie et notre bien-être. Protéger leur santé et leur intégrité est une responsabilité collective, nécessitant des efforts concertés à l’échelle mondiale.
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