
Dans le calme désert de Thèbes, l’histoire des pharaons avait été soigneusement enfouie.
La cachette secrète de Deir el-Bahari dévoila l’héritage oublié des grands rois. Explorez avec nous l’histoire incroyable de cette découverte.
Un désert chargé de mystères
Sous l’implacable soleil qui frappe les falaises thébaines, le temps semble suspendu. Deir el-Bahari, ce nom évoque souvent l’image majestueuse du temple d’Hatchepsout, mais ce site recèle un secret plus ancien encore : une cache funéraire exceptionnelle. Dans cette région aride où le silence est maître, les anciens Égyptiens avaient imaginé une ultime protection contre les ravages du temps et des hommes : dissimuler les plus grands souverains de leur histoire.
Loin des tombeaux prestigieux et pourtant vulnérables de la Vallée des Rois, un abri modeste et discret devint le refuge des âmes royales, espérant y trouver une paix éternelle.
Une Égypte en péril et la mission des prêtres
Au cours du Nouvel Empire, puis lors de la Troisième Période intermédiaire, les temps troublés multiplièrent les attaques de pilleurs sur les tombes royales. Les prêtres d’Amon, figures puissantes de Thèbes, comprirent qu’il fallait agir. Entre le XIᵉ et le Xᵉ siècle avant notre ère, ils entreprirent le transfert des momies royales, les extrayant parfois de leurs cercueils dorés, réparant les sarcophages endommagés, et effaçant ou réinscrivant des noms sur certains cartouches.
Ils déposèrent ces dépouilles sacrées dans un puits creusé dans la roche, dans une tombe secondaire connue aujourd’hui sous le nom de TT320, à proximité du temple funéraire de Montouhotep II. Leur espoir : soustraire ces figures vénérées aux mains profanatrices des hommes.
Une découverte due au hasard… et à l’avidité
Vers 1871, une famille locale, les Abd el-Rassoul, gardiens de troupeaux vivant non loin de Deir el-Bahari, fit une découverte inattendue. Ahmed Abd el-Rassoul, en poursuivant une chèvre perdue, remarqua une faille dans la roche. En s’y aventurant, il mit au jour un puits obscur menant à une galerie remplie de sarcophages, de momies et de trésors insoupçonnés.
Au lieu de signaler immédiatement leur trouvaille, la famille Abd el-Rassoul entama discrètement un trafic d’antiquités. Des objets funéraires anciens commencèrent alors à apparaître sur le marché noir, attirant rapidement l’attention du Service des Antiquités, dirigé à l’époque par Gaston Maspero.
L’intervention officielle : la Cache révélée au monde
Maspero, intrigué par l’arrivée soudaine d’objets royaux, diligenta une enquête. Après de longues négociations et sous pression, un des frères Abd el-Rassoul finit par révéler l’existence de la cachette secrète. En 1881, une expédition officielle se rendit sur place.
Ce que les archéologues découvrirent dépassa l’imagination. Plus de 50 momies royales et nobles, dont celles de pharaons légendaires tels que Séqénenrê Taâ, Ahmès Ier, Aménophis Ier, Thoutmôsis Ier, Thoutmôsis II, Thoutmôsis III, Ramsès Ier, Ramsès II et Ramsès III, reposaient là, superposées, parfois dans des cercueils de fortune.
C’était une révélation capitale : une partie immense de l’histoire de l’Égypte antique refaisait surface.
Une exfiltration sous haute tension
La situation était délicate. Le risque de pillage imminent força les autorités à agir vite. Sous une chaleur étouffante, dans une atmosphère tendue, les précieuses momies furent extraites une par une de leur cachette, enveloppées et transportées discrètement jusqu’au Nil.
Les habitants des villages voisins, émus et fascinés, virent défiler sur le fleuve ces spectres d’un autre temps. Les souverains légendaires, qui avaient régné sur un empire autrefois tout-puissant, reprenaient place dans l’histoire sous les regards ébahis des vivants.
L’impact scientifique et culturel majeur
La Cache de Deir el-Bahari révolutionna l’égyptologie. Elle permit non seulement d’étudier de près les momies royales, mais aussi d’observer les rituels de restauration opérés par les prêtres antiques. Chaque linceul, chaque amulette, chaque cartouche abîmé racontait une histoire de protection désespérée contre l’oubli.
Au-delà de leur valeur scientifique, ces découvertes redonnèrent au peuple égyptien un lien émotionnel profond avec leur passé prestigieux. Les musées du Caire, enrichis de ces pièces inestimables, virent affluer les visiteurs du monde entier, désireux de contempler le visage des dieux-rois.
Le destin des momies aujourd’hui
La plupart des momies découvertes à Deir el-Bahari furent longtemps conservées au Musée égyptien du Caire, dans des conditions rudimentaires. Mais depuis peu, un hommage plus digne leur est rendu : elles reposent désormais dans le Musée National de la Civilisation Égyptienne, où elles ont fait l’objet d’un spectaculaire cortège funéraire moderne lors de leur transfert en 2021.
Ces souverains antiques continuent ainsi de fasciner, d’enseigner, et de témoigner du génie spirituel et politique d’une civilisation qui, malgré les ravages du temps, refuse obstinément de disparaître.
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